Les Territoires de Soins Numériques

La e-Santé est actuellement au cœur des préoccupations d’avenir de notre système de Santé. À l’instar du mythe de l’Eldorado ce qui permettra de lutter contre les déserts médicaux en apportant une réponse à la pénurie de l'offre de soins.

Docteur Christian HUGUE -  Septembre 2017


La e-Santé est actuellement au cœur des préoccupations d’avenir de notre système de Santé. Pour beaucoup c’est à l’instar du mythe de l’Eldorado ce qui permettra de lutter contre les déserts médicaux en apportant une réponse aussi précise que virtuelle à la pénurie de l’offre de soins. Pour d’autres, davantage dubitatifs et sur la réserve, l’e-santé véhicule un modernisme qui passe par l’informatique, l’intelligence artificielle, le big-data, la mise à mal du secret médical ou de la relation médecin-malade.
 

La révolution technologique :
Nous n’éviterons pas cependant un monde moderne résolument « en marche » (sans aucune référence à la politique !), c’est banalement une évolution de notre technologie qui s’est progressivement imposée à nous. Qui s’opposerait aujourd’hui à bénéficier du GPS dans sa voiture, des avantages de son smartphone, ou de tout autre objet connecté de la vie courante ? Les pouvoirs politiques ont voulu démocratiser le monde de la Santé, tant au niveau des médecins que des maladies, à grand renfort médiatique pour informer les « droits des patients », sans jamais évoquer leurs devoirs, ou sur les obligations des médecins. On a créé la télétransmission d’une manière très progressive mais elle s’est imposée à nous aujourd’hui au point que les quelques médecins encore réfractaires aujourd’hui se voient soumis à des contraintes proches de la représailles.

Le transhumanisme :
Qu’on le veuille ou non, le transhumanisme a débuté sous forme d’un mouvement encore flou comme une mouvance intellectuelle liée au développement économique des nouvelles technologies. Il prône l'usage des sciences et des techniques afin de développer les capacités humaines et de dépasser les limitations de l'homme. Le transhumanisme est porté par les développements technologiques contemporains dans l'informatique et les biotechnologies en plein essor actuellement. Mais il faut se garder d’un enthousiasme effréné car si l'homme est aujourd’hui en mesure d’intervenir techniquement sur sa propre évolution, non seulement à l’échelle de l’individu, mais encore à celle de l’espèce, il ne s’agit plus seulement « d'augmenter les capacités et possibilités de l'homme », mais de revisiter rationnellement le concept d’eugénisme !
Les progrès techniques exigent que nous nous demandions ce que nous voulons faire par rapport à l’humain, et pourquoi nous devons les mettre en place. Les dangers d'une telle évolution préoccupent peu le mouvement transhumaniste qui est porteur d'un optimisme qui s’oppose à l'ambiance morose actuelle.

La télésanté :
Quoiqu’il en soit nous assistons aujourd’hui à une évolution considérable de la télé-Santé et l’Ordre doit garantir, sous couvert d’éthique et de déontologie, un certain nombre de paramètres parfaitement connus et mesurés qui doivent cependant faire l’objet d’une adaptation sociétale.
Les actes de télémédecine ainsi que leurs conditions de mise en œuvre et de prise en charge financière ont été fixés par décret, en tenant compte des déficiences de l’offre de soins dues à l’insularité et l’enclavement géographique. (art. L6316-1 du CSP)
La télémédecine se veut un vecteur important d’amélioration de l’accès aux soins, en particulier dans les zones fragiles. Elle permet une meilleure prise en charge au plus près du lieu de vie des patients et contribue à rompre l’isolement dont sont parfois victimes les professionnels de santé et les professionnels du secteur médico-social. Elle constitue aussi un facteur d’amélioration de l’efficience de l’organisation et de la prise en charge des soins par l’assurance maladie.
La télémédecine s’intègre au sein d’un parcours de soins, en le renforçant, et en privilégiant la performance humaine plutôt que l’outil technologique. Elle comprend plusieurs items, validés et vérifiés par le CNOM dès 2014, qui sont le télé-conseil personnalisé, la télé-expertise, la télésurveillance et la télé-radiologie.
Ses objectifs sont nombreux :

  • améliorer l’accès aux soins ;
  • améliorer la qualité de prise en charge ;
  • diminuer les évènements graves ;
  • améliorer la qualité de vie.
Un encadrement est bien sûr indispensable pour éviter les dérives d’une médecine robotisée dans laquelle cette relation humaine si exceptionnelle entre le médecin et son patient, serait absente ! De même, la sécurisation des données de santé doit être une priorité absolue, en prévoyant l’imprévisible issu de l’esprit malveillant de hackers divers et malintentionnés (les pacemakers sont aujourd’hui contrôlables « à distance »)

Les Territoires de soins numériques :
Ce programme vise l’émergence de « territoires d’excellence » pilotes en matière d’usage du numérique, au service de l’amélioration et de la modernisation du système de soins. Il a pour but de développer et mettre en place des systèmes innovants pour coordonner les parcours des patients.
5 projets portés par les ARS ont été sélectionnés en 2014 ayant tous pour objectif d’être créatif et proposer des solutions différentes répondant à des besoins spécifiques pour un territoire, mais aussi d’inventer des éléments communs. Ces projets concernent directement 1,4 million d’habitants, aussi bien citadins que ruraux, et répondent directement aux enjeux identifiés dans la stratégie nationale de santé et la loi de santé.
Les 5 projets retenus sont :
  • Pour la région Nouvelle Aquitaine : XL ENS (Landes espace numérique de santé)
  • Pour la région Bourgogne Franche Comté : E_TICSS (Territoire innovant coordonné santé social)
  • Pour la région Ile-de-France : Terr-e-Santé (« Le numérique au service de la santé en métropole du Grand-Paris »)  
  • Pour la région Auvergne Rhône-Alpes : PASCALINE (Parcours de santé coordonné et accès à l’innovation numérique)
  • Pour l’Océan indien : OIIS (Océan Indien Innovation Santé)
Ces projets s’appuient sur différentes plateformes de « services » centrées sur l’usager pour renforcer la logique de parcours ; ils favorisent une meilleure coordination entre professionnels de santé, patients et aidants, grâce à une mobilisation importante des services d’appui et sont soutenus par des innovations technologiques développées grâce à la coopération de nombreux acteurs, industriels, acteurs de l’offre de soins, collectivités territoriales et partenaires institutionnels. Ainsi, nous trouverons des services dédiés aux résultats biologiques, à la préadmission, à la prise en charge thérapeutique, à la gestion des Rendez-vous, à la prescription des ordonnances et au paiement en ligne…
Gageons que ces « services » ne deviennent pas, un jour peut-être, des « contrôles ».
Le Conseil de l’Ordre restera vigilant !