L'Hôpital Beaujon




Dr X. Grapton

L’histoire de l’Hôpital Beaujon  de Clichy nous fait remonter un siècle et demi en arrière ; c’est en effet en 1784 que l’hospice Saint Nicolas, son ancêtre voit le jour. Son fondateur est Nicolas Beaujon. Qui est ce personnage ?
 

Issu d’une famille protestante agenaise, son père, en 1747, est chargé de superviser les achats de céréales qui serviront à approvisionner le Sud-Ouest du pays ravagé par la disette.

A sa mort, son fils Nicolas lui succède et devient rapidement le directeur de la Chambre de Commerce de Guyenne.

Apprécié pour sa gestion et ses compétences, il est nommé receveur des fiances de la généralité de Rouen et en 1770 il accède au poste de banquier du Roi et de la Cour. Il poursuit son ascension et devient Conseiller d’Etat de Louis XV.

C’est l’époque où financiers et banquiers étalent leur réussite en organisant de fastueuses réceptions dans leurs splendides résidences. En 1773, Beaujon acquiert donc l’Hôtel d’Evreux, actuel Palais de l’Elysée, lieu occupé par le Garde meuble de la Couronne. Il transforme le bâtiment, y expose ses collections de peintures de maîtres flamands, de bronzes, de meubles laqués et de porcelaines. Il fait aménager le parc et finit par vendre en viager le palais en 1786 à Louis XVI.

Nicolas BEAUJON

L'Hôpital (ex-hospice) Beaujon

Entre 1780 et 1784, il achète progressivement un vaste domaine de 12 Ha situé entre l’actuelle Avenue Wagram, la Rue Washington, les Champs Elysées et la Rue du Faubourg Saint Honoré. C’est la Folie Beaujon, résidence comportant la chartreuse, bâtiment principal, le pavillon des bains (future demeure de Balzac), la chapelle Saint Nicolas et un moulin.

Face à ce domaine de Plaisance, en 1784, il fonde l’hospice Saint Nicolas dont la fonction est l’entretien et l’instruction de 80 jeunes orphelins et enfants pauvres de la Paroisse Saint Philippe du Roule située dans le 8ème arrondissement. Rapidement dénommé hospice Beaujon, en hommage au généreux bienfaiteur, l’établissement qui reçoit un nombre égal de filles et de garçons est géré par les Frères Lazaristes pour l’éducation et par les Sœurs Grises de Saint Vincent de Paul pour l’encadrement des filles.

En amateur éclairé des arts, Beaujon avait prévu pour les plus doués des élèves des bourses pour intégrer l’Ecole de dessins, notre actuelle Ecole des arts décoratifs.

Par un décret en date du 17 janvier 1795, la Convention décide d’affecter l’établissement aux soins des malades et l’hospice devient l’Hôpital du Roule.

En 1803, le Conseil Général des Hospices réattribue le nom du fondateur à l’hôpital et en 1810 Beaujon compte 122 lits. Il est désormais sous le contrôle des Sœurs de Sainte Marthe. Progressivement sa capacité d’accueil s’accroit passant à 425 lits en 1848, 600 en 1910, puis 700 en 1935.

Lors de la Grande Guerre, il devient hôpital militaire et le Président Paul Doumer y décède en mai 1932 après un attentat sur sa personne.

C’est une lente agonie qui aboutit à décider en 1930, devant la vétusté du bâtiment, de fermer en un premier temps sa maternité, puis à ne plus accepter de patients en Janvier 1937.

Parallèlement, l’Assistance Publique ouvre un concours pour l’édification d’un nouvel hôpital dont la première pierre est posée en 1933 sur les terrains que l’administration possède à Clichy. Sa construction constitue une première en France sur le plan de l’architecture hospitalière ; elle est l’œuvre de Jean Walter. On qualifie cet hôpital-bloc d’hôpital gratte-ciel avec ses 13 étages censés conjuguer les avantages économiques d’une structure verticale et les vertus hygiéniques supposées de l’altitude… Il prend modèle sur les hôpitaux américains et dès lors les bâtiments pavillonnaires seront définitivement abandonnés.

Quant à l’ancien Beaujon, après sa désaffection, il accueillera un service de la Préfecture de Paris et l’école des Gardiens de la Paix. Il servira de centre de triage des manifestants arrêtés par la police en 1961, 1968 et 1972.

Façade arrière de l'hôpital Beaujon

En 1940 et jusqu’à la Libération, l’hôpital Beaujon de Clichy est réquisitionné par l’armée allemande.

Depuis ses origines jusqu’à nos jours, Beaujon est l’un des centres d’excellence dans les pathologies liées au foie.

L’INSERM sur son site a permis à des personnalités marquantes notamment J. P.Benhamou, S. Erlinger et P. Berthelot de mener leurs travaux sur l’hypertension portale, les hépatites médicamenteuses, l’insuffisance hépatocellulaire grave, les mécanismes de la sécrétion biliaire, l’hépatotoxicité moléculaire et cellulaire, le traitement des hépatites virales et les hépatopathies rares.

Mais l’hôpital certes très orienté avec deux services de gastroentérologie et deux services de pathologie hépato-pancréato-biliaire accueille également les patients dans des unités d’oncologie, de dermatologie, d’hématologie, d’ORL, de médecine interne, de psychiatrie, de gynécologie, d’ophtalmologie, de radiologie et de médecine nucléaire ainsi que dans ses blocs opératoires de chirurgie digestives et surtout d’orthopédie du rachis.

En 2025, l’édifice devrait être abandonné pour être remplacé par le nouvel Hôpital Grand Paris Nord